Maman lors d'un voyage au Maroc
p. 88 Son visage fut lentement saisi par un ton de pierre. La bouche s’est tue. Le sang a reflué dérobant sa couleur et les mots absorbés se sont déliés en silence ainsi que les réponses aux questions que je n’ai pas su poser à temps. Mais il n’aurait pas suffi d’exiger des réponses pour qu’elle puisse les penser et s’en délivrer un jour. J’aurais dû l’aider à formuler l’indicible de Drancy, le silence tumultueux de sa liaison avec l’oncle et l’arrachement douloureux à sa terre natale.
L'oncle Joseph en Narcisse
Je n'ai pas compris de suite ce qui m'avait poussé à faire allusion à Narcisse quand j'ai titré la photo de l'oncle Joseph. Le lendemain, je me suis rendu au musée des Beaux-Arts de Lyon et j'ai redécouvert une peinture de François Lemoyne. Elle représente Narcisse penché sur son image qui se soutient avec un bâton tel un peintre sur son appuie-main. Mon oncle semble gratter la terre pour y retrouver le portrait de ma mère souriante.
Selon une autre version du mythe de Narcisse rapportée par Pausanias, Narcisse avait une sœur jumelle dont il tomba éperdument amoureux ; quand la jeune fille mourut, il se rendit tous les jours près d'une source pour y retrouver son image en se regardant lui-même dans l'eau limpide.
Cette version a ma préférence.
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